Robert Walser

Marcher dans les bois.
La forêt, qu’est-ce que c’est ? Cela s’étend sur les plaines, escalade les montagnes, saute par-dessus les rivières, dévale les montagnes, remplit les vallées…

Nous voyons comme cela se jette dans le miroir des lacs, comme cela joue avec le ciel, comme cela devient la mer, tempête, tourbillon et fleuve.
Alors nous devenons nous-mêmes quelque chose qui s’écoule.
Nous sommes à présent en marche, et il n’y a plus une seule fibre immobile dans notre cœur…
En été la forêt est tout entière couleur, lourde, débordante.
Tout alors est vert, le vert est partout, le vert règne et commande, ne laisse paraître d’autres couleurs, qui voudraient aussi se faire remarquer, que par rapport à lui.
Le vert jette sa lumière sur toutes les formes de sorte que les formes disparaissent et deviennent des éclats.
On ne prend plus garde aux formes en été, on ne voit plus qu’un grand ruissellement de couleur plein de pensées.
Le monde alors son visage, son caractère, il a ce visage-là ; dans les belles années de notre jeunesse il a eu ce visage, nous y croyons car nous ne connaissons rien d’autre.
Avec quel bonheur la plupart des gens pensent à leur jeunesse : la jeunesse leur envoie des rayons verts, car c’est dans la forêt qu’elle a été la plus délicieuse et la plus captivante.
Ensuite, on est devenu grand, et les forêts sont devenues aussi plus vieilles, mais tout ce qui est important n’est-il pas resté le même ?
Père et mère et frères et sœurs, et coups et caresses et goujateries, et, liant tout cela, le fil intérieur de ce vert unique.
Les forêts qu’on a traversées laissent dans le cœur un sentiment de grandeur et de sacré, et un sentiment pareil commande de se taire.

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