Thierry Thieû Niang, Vincent Dissez, Patrick Autréaux : lecture dansée

Créé à Saint-Denis il y a un an, repris à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon où il est né, l’été dernier, ce moment consacré à un texte de l’écrivain de « Se survivre », est pur et profond. Pas même une heure. Sobre et bouleversante.

À la Ménagerie de Verre, salle si particulière, vaste, basse de plafond, salle dans laquelle on a vu au fil des ans de très nombreuses entreprises originales et fortes, cette « lecture dansée » imaginée par Thierry Thieû Niang et ses amis, s’inscrit magnifiquement.

Les spectateurs sont installés sur trois côtés. Espace vide, mais des lumières et un travail sur le son, discret pour la voix, sophistiqué et souvent impressionnant pour la nature : le décor, c’est le son. Une création très maîtrisée de Jimmy Boury. Il y a, ici et là, des micros sur pied devant lesquels se tient Vincent Dissez, feuillets à la main. Il lit, il dit le texte très beau de Patrick Autréaux. Il se déplace selon les mouvements de l’écriture.

Publié chez Verdier ce texte bref commence par l’évocation des cigales et ce sont elles qui stridulent lorsque l’on pénètre dans la salle. « Les cigales ! » : ce sont les premiers mots du texte. Un récit, une pensée en mouvement, une pensée qui fluctue tandis que se lève une tempête et que le narrateur se souvient et s’inquiète pour un bel orme auquel il tient particulièrement.

Patrick Autréaux, qui est l’auteur de très beaux livres également publiés chez Gallimard (Les Irréguliers est le plus récent). Nous n’en dirons pas trop sur Le grand vivant car le découvrir fait partie du plaisir que procure ce moment intense et sobre.

Habillés simplement, les deux artistes, celui qui lit et dit et celui qui danse ne sont jamais dans l’illustration du récit, mais dans une pulvérisation subtile des émotions, des sentiments qu’il fait lever en chacun. Le timbre de Vincent Dissez s’inscrit, comme si l’on entendait une plume crisser sur une page blanche...

Danseur et chorégraphe, Thierry Thieû Niang, avec sa silhouette d’adolescent, sa grâce, sa précision, est d’une certaine manière, lui aussi, un lecteur. Mais rien de surligné. Il se fait quintessence des mots et des arbres, des éléments, du vent et des autres météores.

Parfois les deux « personnages » se rapprochent. Pas de deux, corps à corps.

Il y a du mystère en tout cela. Quelque chose de profond, de troublant. On parle ici avec la nature et les morts. Sans doute n’entendra-t-on jamais la voix des potiers de Babylone qu’évoque l’écrivain. Mais on entend les disparus. Ceux que célèbre Le grand vivant, mais ceux de chacun. Un grand texte : très personnel et universel.

On pense à une image qui nous hante : le comédien Bernard Noël (1924-1970), malade, enlaçait les arbres, ceux qui allaient lui manquer. Demeurait ainsi, comme un enfant au pied d’une divinité. C’est son ami Claude Rich qui raconte cette histoire belle et déchirante. Un grand mourant qui cherchait la force du grand vivant...Il y a des images qui font penser à cela dans cette « lecture dansée »...

Armelle Héliot - Figaro Blog - 26 mars 2016

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