Thierry Thieû Niang

Agapè #2

Il y avait quelque chose, il n’y a plus qu’un creux. Il règne pourtant mais il sent ce creux tout le jour.
Lorsqu’il marche, lorsqu’il danse, lorsqu’il fait l’amour.
La mer en se retirant a laissé une trace.
Le sable est mouillé encore, quelque chose le recouvrait qui n’est plus.
C’est dans son ventre, sa poitrine, c’est sa gorge, ses yeux, ses jambes, ses cheveux. Jay aimerait dire que c’est ici, c’est ma cicatrice sur le sternum, c’est mon père fantôme, c’est ma mère aliénée, c’est la vie qui m’a fait ça.
Il aimerait, mais ce n’est pas le cas.
Son creux, c’est lui.

Pierre Ducrozet

Dès l’Antiquité, le théâtre d’Épidaure est édifié dans un sanctuaire dédié à Asclépios, dieu de la médecine. Des concours de théâtre étaient organisés auxquels assistaient des personnes malades. Le théâtre peut aussi être le lieu de l’exploration de la maladie. Il peut la nommer. La raconter. Dire.

Pourtant, représenter la maladie, c’est représenter une personne qui souffre. Comment, quoi, pourquoi représenter ?

Des mois après le confinement l’impact de la pandémie sur la prise en charge d’autres pathologies est encore difficile à estimer. La crise sanitaire et le stress subi par les systèmes de soins ont ainsi engendrés des retards de diagnostic, de prise en charge, de traitement, de vaccination. Tous les patients n’ont pas consulté pendant le confinement ; des actes chirurgicaux ont été reportés, des chimiothérapies interrompues, des dialyses différées, les missions de recherche suspendues. L’accès aux interruptions volontaires de grossesse a été inquiété tandis que le monde psychiatrique a été interdit et isolé.

Combien d’enfants et d’adolescents n’ont pu continuer leurs traitements et activités en hôpital de jour ?

Nous restons aujourd’hui inquiets, égarés et perturbés. Nous restons inquiets parce que « quelque chose nous arrive » et continue dans l’indéterminé, la vulnérabilité.

Je poursuis ainsi par ma présence au plus près des enfants, des femmes et des hommes, en ce lieu qu’est l’hôpital. Je ne sais pas encore comment. Je ne sais pas encore de quoi sera fait ce rendez vous de novembre mais en accueillant artistes, soignants et patients c’est déjà consentir à un mouvement vivant, vulnérable et partagé.

La solidarité comme l’hospitalité nous permettent de comprendre toujours ce qui « œuvre » en chacun et en commun. L’art joue un rôle essentiel lorsqu’il nous permet d’observer et d’interpréter ensemble le réel par les imaginaires en partage, par la naissance de formes, d’expériences et de pensées autant éthiques qu’esthétiques.

Être au monde, du monde.

Il faut vivre, penser le présent, dans l’inquiétude de ce qui vient, mais aussi dans l’attention au présent, des moments de vérité, de beauté, d’amour.

À quatre heures du matin, l’été,
Le sommeil d’amour dure encore.
Sous les bocages s’évapore
L’odeur du soir fêté.

Arthur Rimbaud

Je suis persuadé que, à tout endroit de notre société, à tout endroit où il y a du commun, de l’en-commun − y compris dans des endroits fragiles, vulnérables, comme la prison ou l’hôpital − l’histoire de l’art a sa place, parce qu’elle est un lien avec le dedans et le dehors, avec les récits intimes et collectifs, donc de la vie et de la mort.

Je me rends compte qu’avec n’importe quelle personne, qu’elle ait 11 ou 89 ans, à l’hôpital, il y a quelque chose qui est partagé, et qui du coup déplace la relation : on est au même endroit, dans le même bateau, dans la même chambre. On est collés l’un contre l’autre sur le coin du lit, à écouter de la musique, à regarder un tableau, à lire un texte et quelque chose circule, se raconte.

Soigner, c’est donner à manger à quelqu’un qui tremble trop pour tenir sa cuillère.
Soigner, c’est retourner trois fois en un quart d’heure dans la même chambre pour retaper un oreiller.
Soigner, c’est passer une compresse d’eau sur le front ou un glaçon sur les lèvres.
Soigner, c’est tenir la main pendant que quelqu’un d’autre suture, ponctionne, arrache, incise, cautérise, injecte, sonde, aspire, accouche.
Soigner, c’est hocher la tête pour dire je suis avec vous.
Soigner, c’est avoir envie de prendre dans ses bras sans pouvoir le faire, mais trouver tout de même un geste qui voudra dire la même chose.
Soigner, c’est être là.

Martin Winckler

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Le Théorème du Pissenlit

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Un Conte d’automne

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